La morsure du froid
Trame sonore de la scène:
La colonne de soldats traversait une épaisse forêt en direction d'un fort isolé qui, autrefois, avait servi de poste de traites. Perdu quelque part au milieu du continent avec pour seule route pour s'y rendre en hiver: suivre une rivière gelée; ce qui n'offrait aucune protection contre les vents particulièrement glaciaux de ce terrible mois de janvier. Surnommé chinook, ces vents pouvaient faire chuter la température sous les -60 celcius. En temps normal, les soldats de la Gendarmerie Royale portaient de pimpant uniformes rouges, ici; pas un seul petit bout de tissus rouge n'était visible sous les épais mentaux de fourrure dans lesquels ils s'étaient emmitouflés. Tenant chacun la bride d'un mulet, portant un fusil en bandoulière, puis un lourd sac à dos, avec des raquettes aux pieds... la progression était lente, difficile et face au vent, elle était des plus éprouvantes. Les hommes devaient marcher tête baissée, se guidant par les traces de pas laissé dans la neige par les hommes et les mulets qui les précédaient. S'ils avaient relevés la tête, la chape de neige qui tombait aurait fouetté leur visage, coupante comme des petits rasoirs. À chaque pas, les soldats maudissaient l'imbécile qui, quelque part dans son bureau, ignorant complètement les rigueurs de l'hiver dans cette région, avait ordonné d'envoyer une relève dans ce foutu fortin au bout du monde. La colonne avait déjà parcouru près de 100 kilomètres, à pied, en une semaine de marche et... ils n'étaient qu'à mi chemin. Plusieurs des 12 hommes étaient déjà exténués car le blizzard qui ne semblait pas avoir de fin empêchant d'allumer un feu pour se réchauffer la nuit, ou encore pour faire bouillir un peu d'eau rendait les nuits courtes et le sommeil précaire. Comme si ce n'était pas suffisant... les sauvages croisés dans la dernière auberge avant le début de leur périple en forêt avait raconté que des bêtes particulièrement féroces se terraient dans ces bois et que celles-ci chassaient les hommes. Le plus superstitieux du groupe, un écossais du nom de MacIntire, était persuadé d'avoir vu une silhouette observant le campement la nuit dernière... quel imbécile, il était en train de semer la panique dans les rangs. Comment un homme seul aurait pu se tenir debout dans ce blizzard et rester planter là à les regarder trembler de froid et tenter de dormir. Puis... le caporal Mullen butta contre le mulet du soldat devant lui, il s'était arrêté. Le caporal plaça la main devant son visage pour se protéger du blizzard, plissa les yeux et tenta de voir pourquoi il s'était arrêté et il aperçu du sang dans la neige blanche. Il y avait un énorme loup éventré avec les tripes répandu sur environ une dizaine de mètres et des traces de pas partait de la scène pour se perdre dans la forêt: Qu'est-ce que ce délire? Le sergent-chef s'approcha du caporal: '' La rivière fait une fourche juste ici! '' Il devait crier pour se faire entendre à travers les hurlements du vent: '' Je n'ai aucune idée de ce qui a pu faire un tel carnage! mais cette chose a laissé ce cadavre sur l'un des embranchement de la fourche! alors on va prendre l'autre! c'est un détour! mais il n'est pas énorme! à peine 25 kilomètres! Qu'est-ce que t'en penses Mullen!? ''
'' J'crois qu'un détour vaut mieux que de risquer d'affronter une bête alors qu'on y voit absolument rien! ''
'' Parfait! Allons-y! ''
Le sergent-chef pris donc l'autre embranchement de la rivière... la colonne se remis en route péniblement et peu après, le peloton de la gendarmerie établi le camp pour la nuit. Il fallut une sévère réprimande pour faire taire McIntire qui était au bord de la panique et répandait toutes sortes d'histoires sur ce qui avait pu réserver un telle sort au loup que nous avions croisé plus tôt. Il fut isolé un peu plus loin avec un autre soldat au bord de la mutinerie... au petit matin, les 2 hommes avaient disparu sans laisser de trace. Le sergent-chef conclus qu'ils avaient déserté et la colonne repris son chemin. Le blizzard ne cessait pas, un véritable torrent de neige qui tourbillonnait bloquant la vue et l’ouïe, rendant jusqu'à la respiration pénible. La progression fut d'autant plus lente et un peu avant la tombée de la nuit, la colonne arriva au sommet d'une chute d'eau gelée qui devait environ faire 40 mètres... pas immenses pour une chute d'eau, mais comment descendre un tel mur de glace aussi lourdement chargé, en plein blizzard avec... des mulets surchargés de matériels. Le Sergent-chef s'approcha du caporal: '' Mullen! t'es notre meilleur grimpeur! tu vas descendre pour voir s'il y aurait pas une route alternative pour faire passer les mulets! au pied de la chute, le blizzard devrait être moins intense! si tu peux pas remonter, on va te hisser du matériel pour la nuit! ''
'' Très bien sergent. '' Le soldat Mullen retira son paquetage, et enfila une sorte de harnais de fortune composé de cordes qu'il noua autour de son bassin et ses cuisses puis, il se mis à descendre la falaise de glaces. Bien que de nature calme, l'adrénaline monta immédiatement alors qu'il était suspendu dans le vide à 40 mètres du sol tentant de descendre une falaise de glace, empêtré dans une véritable purée de blizzard avec le vent qui, chaque fois qu'il soulevait un membre pour descendre de quelques centimètres, menaçait de l'arracher au mur, provocant une chute mortelle. Sa seule assurance: les 9 autres soldats tenaient une corde là-haut, corde relié à son harnais de fortune. Équipée de bottes à crampon et d'un piolet dans chaque main, Mullen traversait l'une des plus périlleuses épreuves de sa courte vie et alors qu'il cherchait une prise solide pour les crampons de son pied droit, il vit la corde que ses camarades tenaient tomber: en fait, un petit mognon de corde de quelques mètres coupée net. Qu'est-ce qui avait bien pu se passer? Mullen était presque à mi chemin, hors de question de remonter. Il poursuivi sa descente et il fut surpris de recevoir des petits éclats de glace... il cru au blizzard, mais non; il s'agissait de morceaux de glaces qui se détachaient de la parois de la chute gelée comme si un autre grimpeur était au dessus de lui. Impossible... il poursuivi sa descente puis il aperçu une ombre, il plissa les yeux... il y avait bien quelqu'un. Le sergent-chef avait-il envoyé un autre grimpeur? Mullen fut rassuré et poursuivi sa descente, ce sentant moins seul accompagné par l'un de ses camarades, jusqu'à ce qu'il réalise subitement que ce n'était pas l'un de ses camarades alors que le second grimpeur fit un bond de plusieurs mètres et perça la glace avec de longue griffes démesurément longues pour des mains d'homme, les longues griffes percèrent le manteau de glace comme s'il avait s'agit de beurre et à quelques mètres de lui, il vit un homme en épais manteau de fourrure, mais sans rien pour protéger sa tête rugir à travers les mugissements du vent dévoilant d'énormes crocs. Mullen ne demanda pas son reste et se mis à descendre d'autant plus rapidement et avec détermination, son cœur ce mis à battre à tout rompre dans sa poitrine et il se mis à avoir chaud pour la première fois depuis plus d'une semaine. Comme si la chose avait ressenti sa peur, ou encore sa détermination... ou l'adrénaline du moment, elle rugi à nouveau. Alors, du sommet de la chute retentirent des coups de feu, un premier... puis un deuxième puis une série de coup de feu. Impossible de dire s'ils atteignirent leur cible, mais chose certaines, ils furent plusieurs à manquer puisque des éclats de glace tout prêt de Mullen éclatait sous l'impact des balles ajoutant une couche supplémentaire au stress déjà insoutenable que vivait le soldat. 18 mètres... Inspire, expire... inspire, expire... inspire, expire... inspire, expire... 17 mètres. Des coups de feu; où est la chose? Impossible de voir dans ce tapis de blizzard! 16 mètres. Inspire, expire... inspire, expire... La glace semble plus mince au pied de la chute, le tirant d'eau étant beaucoup plus important. Mullen poussant une profonde expiration, comme s'il en avait pas déjà assez, l’atterrissage risquait d'être périlleux et si la glace se rompait sous son poids, s'en serait fini, avec le courant, il serait directement entraîné sous la glace de la rivière et s'en serait fini. Inspire, expire... inspire, expire.... 15 mètres. Puis une puissant poigne l’attrapa et s'en suivi une douleur au cou qui enfla immédiatement en une vague de chaleur et d'un étrange plaisir, il se débattis un instant, par instinct et par réflexe, mais s'abandonna rapidement à cette étrange emprise. Alors que le sang de Mullen gorgeait la bouche du prédateur comme un torrent de lave dont on aurait ouvert les valves, le vampire fut traversé par la force de l'âge du jeune homme, mais également un puissant choc d'adrénaline pure; si on avait pu lui faire comprendre ce qu'était l'électricité; il aurait eu l'impression d'en boire à pleine gorgée. Le jeune homme rendit l'âme dans ses bras et il se laissa alors tomber avec le cadavre sur la quinzaine de mètre qui le séparait du lit de la rivière. Le poids des deux corps brisèrent le menteau de glace et il laissa tomber l'homme au fond de l'eau alors que le prédateur se laissa simplement pousser par le courant, sous la glace. Après avoir dérivé quelques dizaines de mètres, il s'accrocha à un rocher et encore gonflé d'adrénaline, il brisa le glace avec ses griffes et se hissa hors de l'eau. Personne ne retrouva jamais Mullen.
Quelques part dans une base militaire
'' Major Cumberland? C'est vous l'imbécile qui avez envoyé un peleton relever un contingent dans un fort au nord du 55e parrallèle en plein hiver?'' L'officier assis derrière sa machine à écrire se leva et fit un salut militaire à son supérieur: '' Oui colonel. ''
'' AVEZ-VOUS PERDU LA TÊTE PAUVRE IMBÉCILE?! VOUS IREZ PORTER CHACUN DES 12 DRAPEAUX CANADIENS AUX VEUVES DES DISPARUS ET ENSUITE VOUS SEREZ RÉTROGRADÉ AU GRADE DE CAPORAL! ''
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