Langage & dictons de l'Archipel
Avant mon Pèlerinage, j'ignorais même l'existence d'une autre langue que celle que l'on appelle depuis "le commun". Les peuples concernés l'oublient eux aussi, petit à petit, génération après génération, et il n'en reste aujourd'hui que des bribes en circulation dans notre monde.
Il suffit de voyager un peu et de passer du temps avec Ventiers, Sanguins ou même Ruchiers pour réaliser que certains mots se recoupent et se ressemblent d'un peuple à l'autre. Ce savoir ne peut pas disparaître avec la mort de ses derniers détenteurs. Pourquoi personne ne se bat-il pour préserver ces vestiges ? Pourquoi personne n'étudie les similarités dans les dialectes domestiques, les déformations des mots d'une île à l'autre ? Suis-je le seul à y avoir une porte ouverte sur notre passé oublié ?
Le langage commun et l'Al-Fãbet
La totalité des peuples de l'Archipel parlent un langage sobrement appelé "commun", même si les Recollecteurs et les Apatrides tentent parfois de s'en attribuer l'invention, étant les deux seuls à ne pas avoir de langage propre. Le commun peut varier légèrement d'une île à l'autre, être parfois mal parlé par les Ventiers ou les Sanguins les plus âgés et reclus, mais reste compris de tous. Ceux qui savent l'écrire le transcrivent dans l'Al-Fãbet, une graphie ancienne et mal comprise de la plupart qui permet d'immortaliser des mots sur un support matériel. Pour beaucoup, cette capacité est surnaturelle et relève des dons hymniques, même si les Recollecteurs affirment que quiconque peut apprendre avec de l'entraînement. La vérité est probablement quelque part entre les deux ; si la quasi-totalité des Recollecteurs y parviennent, c'est par exemple loin d'être le cas des Apatrides ou des Sanguins qui présentent un fort taux de disque-lésie.Les langages domestiques
Les Clans du Vent, la Tribu du Sang et, dans une moindre mesure, les Nomades disposent de mots de vocabulaires uniques dont la construction ne rappelle pas le commun. La grande majorité est incapable de s'exprimer entre eux sans recourir au comumn, mais certains shamans Ventiers ou doyennes Sanguines peuvent déclamer des phrases entières qui seront incompréhensibles pour un locuteur du commun. Il s'agit souvent de mantra, de vers ou de prières qui semblent plutôt apprises par coeur par tradition orale, que d'une véritable capacité à construire un discours dans une langue étrangère. Malgré tout, ces locutions sont des traces de langages plus anciens, qui prédatent probablement le commun, et ont survécu sous forme de vestiges jusqu'à l'époque actuelle. Des locutions similaires entre les peuples laissent également penser à des transferts qui vont dans le sens des historiens qui affirment que les peuples n'ont pas toujours vécus aussi isolés qu'aujourd'hui, et que la volonté de la Troupe de l'Horizon de tisser des liens entre les îles n'est en fait qu'un retour à l'état antérieur.De la disque-lésie
Cette maladie (puisque l'Académie l'a classifiée comme tel) est prépondérante chez les Apatrides et chez les Sanguins. Nomades & Ventiers aussi, dans une moindre mesure. Les nôtres, eux, sont préservés en quasi-totalité. Nous avons longtemps pensé qu'être mieux connecté aux Hymnes était l'explication à cette protection. Les travaux récents montrent pourtant que des enfants Recollecteurs très peu doués dans les Hymnes parviennent à lire. Il n'y a visiblement pas besoin d'être très polarisé -oui, je sais, pardonnez-moi du terme, évidemment que je l'ai lu, ils l'ont sorti semaine dernière, vous pensiez que j'allais l'ignorer vu le boucan qu'il a fait ?- dans le Bleu pour y parvenir. N'est-ce pas plutôt que nous avons tous été entraînés, dressés, éduqués dans notre compréhension et utilisation des Hymnes dès l'école élémentaire ?[Note du scribe : une pause est observée pour que le calme revienne dans la salle suite à l'allusion aux travaux Archébène.]
N'en déplaise à mes confrères ici réunis, la coïncidence est trop grosse pour pouvoir ignorer la corrélation entre l'émergence de la disque-lésie et le manque d'éducation dans les Hymnes. Que je m'exprime clairement ? Soit. Est-ce que la disque-lésie ne serait pas une forme de surcharge ? On sait depuis l'À-pic de l'Asymptote qu'à haut niveau d'exposition, les odeurs se confondent avec les sons, les goûts avec les couleurs. Est-ce que quelque part, confondre les p et les q, les b et les d, je vous le demande... est-ce que nous n'aurions pas là une surcharge légère, permanente et définitive, chez les individus à qui nul n'a jamais appris à se protéger ?
Argot & dictons
Universel
- Avoir les yeux ronds comme des Qupids : être surpris.
- Brave comme un Squame : couard.
- Chercher les dents d'un Malikhyr : chercher ce qui n'existe pas, viser l'impossible
- Et ma mère c'est une hymnière : marque le refus de croire à une affirmation, le doute.
- Faire son Nomade : refuser de mettre les pieds quelque part, tergiverser, avoir peur de s'engager durablement.
- Il y a baleine sous l'île : il y a quelque chose qui se trame.
- Lèche-qupid : pingre, avare, avide.
- L'Oeil tourne : le temps passe
- Malin comme un airin : idiot, mais aussi suicidaire, inconscient.
- Nistique : labyrinthique, désorganisé. Allusion au Nid.
- Parler Ruchier : être incompréhensible.
- Quand le Nid s'arrêtera : désigne quelque chose qui n'arrivera pas avant longtemps, voire jamais.
- Qui couche avec des Niale se lève avec des puces : mériter ce qui nous arrive, l'avoir bien cherché.
- Recauseries : palabres ; manque flagrant de concision.
- Réduire son airnage : se recentrer sur les problèmes pertinents ; cesser d’aller et venir
- Rouler sur les Qupids : avoir beaucoup d'argent.
- Tailler l'os du mort : faire avec ce qu'on a.
Apatrides
- Bandelyvr : un Recollecteur. Par extension, une personne qui n'agit jamais, un beau-parleur.
- Bignol : nécessaire de crochetage.
- Bignoleur : cambrioleur, voleur. Par extension, désigne aussi les personnes peu fiables, les acrobates et les saltimbanques.
- Bouffeur d'agrumes : un Nomade.
- Bourse-molle : un couard.
- Comme une pute à l'Enclavre : être dans son élément.
- Chouffe : objet volé, dérobé, butin.
- Cochouffe : une planque, un repaire.
- Cognepense : un Sanguin. Par extension, une personne impulsive, qui réfléchit peu.
- Dodu : une cible facile.
- Gobe-chouffe : receleur, criminel.
- Lourdauds : la Milice.
- On s'en reparle aux Ophtalies : cause toujours. Parfois utilisé comme une véritable menace.
- Pas sous l'Oeil : pas ici, pas maintenant.
- Pluie d'en bas n'arrête pas l'Entrailleux : ne pas avoir le choix, se retrousser les manches.
- Une affaire de Fauxçonneur : histoire louche, suspicieuse, mensonge, arnaque.
- Trottoir pour Intersticiel : chose inutile, mal pensée.
- Tympe-en-pointe : un Ventier.
Recollecteurs
- Aller vendanger à Hautemire : tenter l'impossible, viser trop haut.
- Aussi fréquent qu'un Sanguin qui lit : rare.
- Bienommé/malnommé : personne qui porte bien/mal son nom de vertu Recollecteur
- Bleuir : calmer les ardeurs de quelqu’un ; recouvrer son sang-froid. Utilisé surtout par les Hymniers de bon niveau.
- Ceci aussi passera : dicton utilisé comme équivalent à "ça ira mieux demain", mais aussi parfois dans le sens inverse (un moment joyeux passera lui aussi).
- Celui-là a inventé la Pahyra : mythomane, vantard.
- Comme on ramasse la Pahyra : action facile, très aisée, jeu d'enfant.
- Comme un métèque : hors de son élément, déplacé, incongru.
- Donner de la viande à un Apatride : gaspiller.
- Fin comme un Sanguin : stupide, maladroit socialement ou physiquement, corpulence imposante
- Fumeur de Prescience avariée : diseur de bonne aventure, personne infréquentable.
- Hypercéphale : qui a pris la grosse tête, par exemple après être passé au pouvoir pour un mandat
- Quand les Ventiers auront un calendrier : désigne quelque chose qui n'arrivera pas avant longtemps, voire jamais.
- Préférer les bains sans buée : être un pervers, un voyeur
- Rougir : perdre son calme, ses moyens.
- Une histoire à orbites traversantes : histoire compliquée, tarabiscotée, inextricable
- Tirer la queue du Strie-dents : chercher les problèmes, prendre des risques inconsidérés.
- Verdir : embellir, falsifier.
Clans du Vent
- Ahai : salut standard, bonjour.
- Blass ! : juron marquant alternativement la surprise, la colère, la surprise. Equivalent de "Putain !".
- Boucler le vent : tourner en rond.
- Grain noir va voler fort : une tempête approche.
- Havaan : littéralement "vis encore". Alternative à "bon vent", "sois prudent" et "porte-toi bien".
- Harké ! : "attention !" ou "regarde !"
- Penché dans l'autre sens : détoner, faire tache, contraster. Par extension, se dit d'un excentrique, d'un rebelle.
- Sourd-au-vent : tête de mule, inconscient, égoïste.
Tribu du Sang
- Aller de cairn en cairn/semer des cairns : aller d’épreuve en épreuve ; affronter de multiples périls.
- Blast ! : juron marquant alternativement la surprise, la colère, la surprise. Equivalent de "Putain !".
- Il n’y a pas la furie au lac : proverbe sanguin signifiant "il n'y a pas d'urgence".
- Kair ! [kaiʁ] : prononcé "kaïre". Littéralement "silence", tais-toi, voire ferme-là.
- Usgekryn [usɡekʁain] : prononcé "ousguékraïne". "Sans honneur", qui contrevient aux valeurs fondamentales sanguines.
- Lardon : Recollecteur. Au sens figuré, un faible, quelqu'un de peu vigilant, une proie facile.
- Stinkt otas tegaban : littéralement "mangeur de neige jaune". Les sanguins ont parfois l'amabilité de le traduire en commun par "gobe-pisse". Péjoratif.
- Sana : Madame, femme. Marque de respect, surtout à une aînée.
- Kyosana : chef. Salut de respect à un supérieur (y compris masculin).
Nomades
- Ahai : salut standard, bonjour.
- Appagrain : une tempête violente. Fonctionne aussi au sens figuré.
- Avoir les oreilles trop pointues : être trop mystique ; ne pas avoir les pieds sur terre
- Bûcheronner un Ambrûlant : se jeter dans un piège, manquer d'instinct de survie.
- Comme flottent les ballons : non-réponse à une question, quand on souhaite garder secret une méthode personnelle
- Du genre à rater une orbite stationnaire : peu doué, maladroit, incapable.
- Ratéphémaire: toujours en retard ; peu ponctuel.
- Fixe : se dit de quelqu'un qui n'embarque jamais ; péjoratif, désigne aussi les couards, les gens qui n'entreprennent rien de leur vie.
- Gosse : insulte chez les Nomades lorsqu'employé à propos d'un individu qui a dépassé les six ans. Désigne une personne trop peu autonome, peu dégourdie, voire idiote.
- Gosserie : bêtise, erreur idiote.
- Grain noir va voler fort : une tempête approche.
- Oublier son quart : peu fiable, être tête en l'air.
Table des Matières
Le langage commun
Les langages domestiques
Argot & dictons
████████ m'aurait hurlé dessus. Il me l'avait bien dit. Je ne sais pas comment il l'avait deviné, mais il savait.
Ma main tremble à l'heure où j'écris ces lignes. Les shamans de la Ruche gravent les mêmes runes que les Clans du Vent. Les mêmes r u n e s ! Dans l'os aussi, en y prêtant les mêmes vertus hymnoactives. Qu'est-ce que ça veut dire ? Est-ce que ces runes sont un autre Al-Fãbet ? Un Al-Fãbet qui recèle du pouvoir ? Est-ce que, si l'on trouvait quelqu'un capable de lire les runes, il prononcerait des mots en commun, ou dans un autre langage ? Si la réponse est "en commun", alors est-ce que cela veut dire que notre propre Al-Fãbet recèle une quelconque capacité à déclencher une réaction des Hymnes ? Si la réponse est "un autre langage", alors est-ce que cela veut dire qu'il existe des mots, prononçables à l'oral, qui déclencheraient une réaction des Hymnes ?
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