Sous un ciel déchaîné, je me tiens là, Samay, prince elfe en exil, spectateur et acteur d'une bataille qui transcende l'entendement. La poussière du passé est encore collée à nos vêtements. La pluie, telle une larme des dieux, s'abat sur nous, mêlant sa voix au fracas des armes et des incantations. Les mots d’une lettre à peine lue se fraient un chemin dans le tumulte des voix qui crient dans ma tête, mais l’urgence les repousse dans leur vestibule d’angoisse, pour plus tard. Les ruines de la tour des mages de Naga témoignent du désespoir de notre lutte, tandis que l'hydre, monstre de légende, déchaîne sa fureur sur le champ de bataille.
Au cœur de cette tempête de violence, un elfe, pris au piège sous les décombres, attire mon regard. Sa beauté, même dans la douleur, éclipse la fureur de l'orage, sa bravoure illuminant les ténèbres de la bataille. Cet inconnu, dont la jambe est cruellement emprisonnée, incarne l'héroïsme dans sa forme la plus pure, comme Bran dont je suis fier d’être l’ami. Je sens en lui un frère d'armes, un esprit indomptable qui, malgré ses blessures, lutte pour survivre.
Mes compagnons et moi faisons face à l'adversité avec une détermination farouche. Brän protège les enfants, confiant leur sécurité à Louna, sa louve. Kay, vif comme l’éclair qui vient de s’abattre, défie l'hydre avec une flèche bien placée, tandis que Pangur Ban se jette dans la bataille, sa fidèle panthère à ses côtés. Moi, je me tourne vers les pouvoirs que j'ai acquis dans l'ombre, un pacte scellé avec un ancêtre transcendé, qui s’était adressé à moi directement il y a maintenant une éternité… Je suis perdu, dépositaires de pouvoirs qui m’auraient fait rêver, enfant, mais qui m’étonnent toujours aujourd’hui..
Je rassemble mon énergie, canalisant les ténèbres pour envelopper l'hydre dans un voile d'obscurité, espérant l'aveugler, lui ôter son avantage. Mais ce n'est pas suffisant. Inspiré par l'héroïsme de l'elfe au sol, je puise plus profondément dans mon pouvoir, ouvrant une brèche entre les mondes, un soupir entre les étoiles. Je lui donne un but, une cible, je lui confie mon espoir et ma rage… Petit à petit je sens basculer les saisons en moi… Je m’accroche au printemps comme un enfant à son cerf-volant, mais je ne peux m’empêcher de penser à ce symbole frappé et déchiré par la foudre. Les voix et les murmures dérangeants se font entendre, emprisonnant l’hydre dans une gangue de tentations et doutes, de froid, et d’obscurité… Je sais bien que ce n’est qu’un mince répit, et notre adversaire comprend vite qu’il ne doit pas rester ici, mais au moins j’ai pu l’éloigner de l’elfe blessé. Franchissant le voile brumeux auquel tout Eladrin a accès, je raccourcis la distance qui me sépare de l’elfe blessé, au plus près possible, et, contournant la monstruosité, j’essaie d’évaluer son état et ce que je peux y faire.
Le combat s'intensifie, chaque coup porté avec la conviction que la fin est proche. Moonie tombe, et mon cri inaudible accompagne sa chute, mais heureusement elle se relève, grâce à notre Bran. Kethot arrive à nous faire gagner un temps précieux en enchevêtrant la bête, et Monnie à peine remise nous baigne de sa bénédiction divine, soignant les blessés avec une efficacité redoutable. Pangur et Kay ne sont pas en reste, harcelant au mieux l’Hydre, mais cette dernière est obnubilée par Bran, notre paladin lui ayant lancé un défi que nulle personne ou créature ne saurait ignorer, tellement baigné de divin et de force de conviction. Mais l’hydre est bien trop forte, à chaque tête coupée, deux repoussent. La maitrise sur ma saison se brise alors, et je cède à l’hiver, à nouveau. Froid. Implacable. Déterminé. Une main spectrale prolonge mon propre geste, vers l’hydre, et je l’attaque sans une once d’hésitation…Je ne sais pas si c’est mon ancêtre qui me guide, ou un instinct, peut-être est-ce juste de la folie. Mais, pourtant, le miracle opère. Cette chose semble ne plus pouvoir se régénérer. Il faut que je maintienne la pression, répétant encore et encore cette attaque que je répugne d’ordinaire à utiliser. Le secret pour briser la capacité de régénération de l'hydre, je le partage avec mes alliés, et ensemble, nous lançons un assaut coordonné. Nos attaques, imprégnées de magie et de courage, s'abattent sur la bête avec une précision mortelle. Je lance des décharges occultes, chacune portant en elle l'espoir de sauver l'elfe blessé, car il ne pouvait être dit que nous aurions traversé tout ça pour finalement voir mourir un héros à nos pieds.
Finalement, l'hydre succombe, s'effondrant sous le poids de nos attaques combinées. Le calme qui suit est un contraste saisissant avec le tumulte de la bataille. Nous sommes là, épuisés, trempés, mais victorieux, entourés des ruines et du souvenir de notre lutte. C'est une victoire, certes, mais pour moi, c'est plus que cela. C'est une affirmation de mon chemin, de mon exil, et de la connexion inattendue que j'ai ressentie avec cet elfe au sol, et la foi qui se nourrit dans les relations que j’ai à présent avec mes amis. Dans ce moment, je suis Samay, non seulement un prince en exil mais un frère d’armes pour ceux qui luttent dans l’obscurité. Peut être que ma lumière ne brille pas comme elle devrait, mais j’utiliserai tout ce que j’ai, tout ce qui me coute, pour poursuivre ce chemin.
Après la victoire sur l'hydre, une victoire qui a exigé de nous chaque once de courage et de force, nous nous dirigeons vers un refuge naturel, un arbre majestueux sous lequel nous établissons notre campement. Les branches de cet arbre, s'étendant comme pour nous accueillir, nous offrent un abri contre les éléments, un moment de répit dans le tumulte incessant de notre quête.
Dans cette quiétude relative, un sentiment de paix m'envahit, contrastant fortement avec l'agitation de la bataille. Cependant, cet apaisement est teinté d'une préoccupation croissante pour l'elfe que nous avons sauvé, cet inconnu dont la beauté et l'héroïsme m'avaient marqué. Malgré les soins que nous lui prodiguons, il reste plongé dans un sommeil profond, inatteignable, ses yeux fermés comme s'il refusait de se réveiller dans un monde marqué par la souffrance.
C'est dans ce contexte, alors que l'air est chargé d'inquiétude et de sollicitude, que Kethot, notre druide au cœur aussi ardent que sa chevelure, agit sous l'impulsion d'une intuition soudaine. Avec une tendresse qui semble puiser dans les profondeurs de la magie elle-même, il dépose un baiser sur les lèvres de l'elfe. Le geste, désespéré mais empreint d'une puissance inconnue, brise le voile du sommeil. L'elfe s'éveille, repoussant doucement Kethot dans un moment de gêne partagée qui, étrangement, dissipe la tension de l'air. J’ai un sourire sur le visage, car cette scène me rappelle beaucoup les récits que mère nous contait.. Mère… ce mot semblait prendre des significations diverses et perturbantes depuis notre passage dans la tour.
Lorsque ses yeux se posent sur moi, je ressens un frisson d'incertitude. Dans son regard, je lis une reconnaissance, un lien inexplicable qui semble nous unir au-delà de notre rencontre fortuite. Mon cœur est partagé entre la joie de le voir éveillé et une confusion profonde. Pourquoi son regard sur moi éveille-t-il une telle tempête d'émotions ?
Lorsque je me présente, sa proposition de me renommer "Ke Saman" me prend au dépourvu. Ce nouveau nom, un écho à une ressemblance que lui seul semble percevoir, me fait réaliser l'ampleur de notre connexion. Cette offre, bien que simple, me touche profondément, ravivant les feux de mon identité longtemps voilée par l'exil et la solitude. Je me sens à la fois honoré et intrigué, conscient que ce moment marque le début d'une nouvelle voie, non seulement pour moi, mais pour nous tous.
Comme pour appuyer ce fait, je sens que je peux à nouveau prendre d’autres apparences et identité. C’est à la foi une joie et une souffrance, car j’avais usé de ce stratagème pour survivre, lorsque mon protecteur avait été assassiné, et j’avais perdu cette faculté lorsque j’avais trouvé le livre des Ombres… Mais étrangement, à présent que je pouvais de nouveau être n’importe qui, je souhaitais être Samay… Ou peut-être « Ke Saman »…
Cette soirée sous l'arbre bienveillant se transforme en un carrefour de destins entrelacés, où mes sentiments contradictoires - l'émerveillement, la confusion, et une curiosité renouvelée pour l'avenir - se mêlent dans le calme de la nuit. La présence de cet elfe, et le nom qu'il m'attribue, s'inscrivent désormais dans le récit de ma vie, un récit où la magie et les liens humains dévoilent des chemins inattendus vers la rédemption et la découverte de soi.
Lorsqu’il nous dit son nom, Arin, et sa renommée, fondateur des messagers d’Harmonie, je loupe quelques phrases… J’ai l’impression que l’espoir me transperce le cœur, alors qu’il nous confirme qu’il a croisé le chemin de ma sœur et de ses compagnons. Elle est encore en vie ! et elle trace son chemin qui semble auréolé de gloire. Mon sourire reviens et avec lui le printemps, mes yeux d’or et de cuivre brillants comme il se doit. Je le regarde benoitement, réalisant qu’il attend une réponse de moi, alors que je comprend à retardement ce qu’il vient de me proposer… Une nuit avec lui ?...
Le défilé royal, avec tambours, chevaux, trompettes et forces annoncements , semble vouloir élire domicile dans tout mon corps, l’hésitation , la peur, l’envie, la honte, toutes écrites en lettres ampoulées, en haut de la suite de décrets royaux à ratifier pour aujourd’hui… Je finis par balbutier de façon totalement stupide un « oui » faible, mais Arin ne me laisse pas le temps d’y réfléchir et me prend déjà par la main pour m’entrainer plus loin. Je crois me rappeler que je lui ai demandé si on pouvait parler de ma sœur, ce à quoi il avait répondu « oui, si ça te fais plaisir.. si on trouve le temps »…
Au sein du sanctuaire que formait notre temps partagé, baignée par la lumière argentée de la lune, l'air semblait chargé d'une promesse inexprimée. Le moment où nos regards se croisèrent, un frisson parcourut mon être tout entier, annonçant l'aube d'une révélation intime. Sa présence, à la fois rassurante et excitante, faisait vibrer en moi des cordes longtemps oubliées, éveillant un désir ardent mais teinté d'appréhension. Depuis longtemps je jouais une partition virtuose, écrite pour un hédoniste, jouée par un instrument brisé, mal accordé. Envie. Douleur. Passion… crainte…
"Ke'Saman," murmura-t-il avec une douceur infinie, ses yeux plongés dans les miens, "tu es si semblable à lui..." Sa voix était empreinte d'une mélancolie teintée d'espoir, et dans son appel, je perçus la profondeur de son affection, un hommage à la fois à son passé et au lien naissant entre nous, mais aussi une douleur, une gêne… Le masque autoritaire, hautain même, avait été déposé au milieu de la pile de nos vêtements..
Je frissonnai sous son toucher, non de peur, mais d'une révélation naissante. Ses doigts, en traçant des chemins invisibles sur mon corps, semblaient dialoguer avec chaque cicatrice, chaque mémoire enfouie. Lorsqu'il effleura une marque particulièrement sensible sur mon dos, mon corps se tendit malgré moi, un réflexe conditionné par des souvenirs douloureux.
Arin s'arrêta, son regard empli de compréhension. "Je suis là, Samay. Avec toi, tu es en sécurité," dit-il doucement, sa main quittant ma peau pour chercher la mienne, entrelaçant nos doigts dans un geste de soutien et de connexion. "Je ne te ferai jamais de mal. Nous irons à ton rythme, et seulement si tu le souhaites."
Son assurance, son respect de mes limites, alluma en moi une étincelle de désir, un besoin de me reconnecter avec une partie de moi-même longtemps négligée. "Je... je le veux, Arin," avouai-je, ma voix tremblante mais résolue. "Avec toi, je me sens... différent. Vu. Entier."
Arin sourit, un sourire qui illumina son visage et réchauffa mon cœur. "Alors, explorons ensemble, Ke'Saman. » et il plaça ma propre main sur son torse, chaud. Obnubilé par ses yeux, je n’avais pas encore fait attention à son tatouage qui prenait pourtant une bonne partie de son corps… Un Ouroboros, si finement détaillé, si emplein d’éternité. A ma question sur sa signification, il me répondit gêné qu’il représentait le cycle éternel de la vie, lui rappelant son amour de jeunesse perdu. Un pincement au cœur s’invita soudain. Jalousie. Compassion. Quelque chose de plus grand et de plus vieux que moi, mais aussi une part d’Histoire, comme celle que nous narrait notre mère…
Ce qui suivit fut une exploration mutuelle empreinte de respect et de découverte. Arin me guidait avec une patience angélique, chaque caresse et chaque baiser semés comme des promesses sur ma peau. Ses gestes, toujours prévenants, me demandaient silencieusement la permission de continuer, s'assurant de mon confort à chaque instant.
Lorsque ses lèvres rencontrèrent les miennes, ce fut avec une douceur si palpable que mes dernières réserves semblèrent fondre comme neige au soleil. Le désir naissant entre nous était pur, exempt de la peur qui avait longtemps assombri mon cœur. Dans ses bras, je découvris une passion nouvelle, un désir libéré des ombres du passé.
Et moi, sous le regard aimant d'Arin, je me sentis renaître. "Avec toi, Arin, je me sens... libre. Comme si les chaînes de mon passé se brisaient enfin."
À un moment, Arin, avec un sourire espiègle illuminant son visage, me proposa un défi. "Que dirais-tu, Ke'Saman, si nous inversions les rôles? Si pour une fois, le prince exilé prenait le contrôle sur le ranger solitaire?" Sa voix, teintée d'une malice joyeuse, piqua ma curiosité autant que mon désir.
"Hum, et si je refusais?" rétorquai-je, jouant le jeu, un sourire narquois aux lèvres.
"Alors, je serais forcé de recourir à des mesures... extrêmement agréables pour te convaincre du contraire," riposta-t-il, ses yeux pétillant de défi.
Acceptant le challenge, je pris une mine faussement autoritaire, m'avançant vers lui avec une démarche exagérément pompeuse. "Eh bien, ranger Arin, il semble que tu doives apprendre à respecter l'autorité royale," dis-je, peinant à maintenir un visage sérieux.
Arin éclata de rire, un son si contagieux que je ne pus m'empêcher de le rejoindre, nos rires se mêlant dans l'air chargé d'une tension électrique. Mais alors, avec une rapidité surprenante, il inversa notre position, me plaquant doucement contre le sol, ses mains encadrant mon visage. "Oh, je respecte l'autorité, mais seulement quand elle sait exactement ce qu'elle désire," murmura-t-il, avant de capturer mes lèvres dans un baiser à la fois moqueur et incendiaire.
Notre jeu de rôle continua, oscillant entre domination et soumission, je m’amusai à prendre d’autres apparences, mais il n’aimait pas ça, aussi je restai simplement moi, et nos joutes toujours teintées d'un respect mutuel et d'un désir profond de faire plaisir à l'autre. Nous rions entre les baisers, et nos gestes beaucoup plus osés, nos corps s'exprimant avec une aisance et une joie libérées des conventions.
À un moment donné, alors que j'avais repris l'avantage, j'ordonnai à Arin, avec un sérieux feint, de m'apporter la plus exotique des friandises de son imagination, qu’il devait me présenter sans utiliser ses mains. L'ingéniosité avec laquelle il s'exécuta, me fit rougir de naïveté lorsqu’il me présenta « la friandise », et transforma l'acte en une expérience à la fois hilarante et incroyablement sensuelle.
Chaque geste, chaque échange, renforçait notre connexion, transformant même les défis les plus absurdes en prétextes pour explorer la profondeur de notre désir. Dans ces moments, la vulnérabilité devenait notre force, et le rire, notre lien le plus intime.
Ce jeu entre nous, cette capacité à naviguer entre les rôles avec aisance et humour, dévoila une couche supplémentaire de notre relation, un espace où la confiance et le consentement formaient le socle de notre intimité. Dans cette danse ludique, nous découvrions que l'érotisme, loin de se limiter à la passion, s'enrichissait de rires partagés, créant entre nous un monde où chaque moment était une découverte, chaque toucher, une promesse d'infinies possibilités.
Cette nuit-là, Arin m'apprit à désirer à nouveau, à faire confiance non seulement à un autre mais aussi à moi-même. Ensemble, nous avons tracé un chemin à travers les ombres, trouvant dans le partage et l'intimité une lumière qui promettait de guider nos pas vers un avenir empreint d'espoir. Je n’avais pas la naïveté d’y placer autant d’intensité et d’avenir, mais ses bras autour de moi était le seul avenir qui m’importait, ici et maintenant.
Bien plus tard, mes doigts s’amusant à tracer son tatouage, je lui demandai des nouvelles de ma sœur, le faisant rire dans un premier temps.
« têtu comme lui hmm ? Ke’Saman ».. Mais il me répondit. Elle l’avait impressionné et il lui trouvait une véritable âme de dirigeant.. Il me confirma, sans vouloir le faire vraiment, pour ne pas briser une promesse, ce que je soupçonnais depuis que j’avais lu la lettre. Il me confia m’avoir cherché pendant deux ans avec les mages de Naga, mais en vain..
Nous de dormons pas, nous méditons… Mais pourtant, je ne fu jamais aussi proche du sommeil que contre lui, m’enveloppant d’Arin comme un manteau, pour m’y cacher et me réchauffer…
Lorsque l'aurore effleura le ciel de ses premiers rayons, disséminant une lumière timide à travers les nuages, le réveil au camp fut doux, empreint d'un mélange de mystère et de réflexions nées de la nuit passée. Malgré l'épaisse brume d'incertitudes et de secrets non dévoilés, l'appel impérieux de l'aventure nous poussa à nous préparer, l'arrivée d'Arin parmi nous injectant un nouvel élan à notre détermination.
Arin, dont la présence s'était rapidement révélée indispensable, proposa d'accompagner notre périple vers Neverview, révélant ainsi que nos chemins étaient étrangement alignés. Cette alliance, bien que vue d'un œil méfiant par certains, ne pouvait être écartée, la réputation et le mystère entourant Arin Aleksander Drake, le fondateur des Messagers d'Harmonie, promettant d'être un atout de taille.
Le crépuscule nous enveloppa de ses couleurs flamboyantes alors que nous approchions de Neverview, cité encerclée de terres fertiles et de marécages, se dressant fièrement devant nous. À ses portes, un mélange hétéroclite de marchands, d'aventuriers et de locaux témoignait de la vitalité de la ville, tandis que les gardes, imposants, contrôlaient l'accès en échange de quelques pièces.
Brän tenta de négocier notre entrée, espérant que la mention du fils perdu d'un conseiller susciterait l'empathie des gardiens. Face à leur indifférence, ce fut Kay, avec une habileté de roublard, qui, en exhibant des trophées de Gnolls, gagna notre passage, transformant leur réticence en une acceptation silencieuse.
À peine les portes de Neverview franchies, une sensation étrange s'empara de Moonie, convaincue d'être suivie, une impression confirmée par le regard méprisant de fidèles d'une foi rivale. Leur dédain manifeste, marqué par un crachat à ses pieds, laissa un goût amer, révélant les fissures religieuses qui zébraient la cité.
Devant un tableau d'avis de recherche, Kay reconnut, non sans stupeur, le visage d'un ami d'enfance d'Amellys, désormais recherché pour un crime grave. Cette découverte nous plongea dans un tourbillon d'émotions contradictoires, nous confrontant à la dure réalité de notre monde.
Toutefois, l'urgence de notre quête nous rattrapa vite. La nuit tombante et les ombres s'allongeant sur Neverview nous rappelèrent à nos obligations. Nous nous mîmes en quête du palais du conseil, guidés par une mission dont l'issue pourrait bien déterminer notre avenir.
Sur notre chemin, un messager reconnut les insignes de Sumie sur Moonie et lui remit une lettre de son temple, portant de sombres nouvelles. Tandis que Moonie absorbait le contenu de la missive, Arin échangea quelques mots avec le messager, avant de nous annoncer son départ, non sans promettre de nous retrouver au siège de sa guilde.
L'aube peignait le ciel de Neverview de teintes douces lorsque je me rendis compte que notre groupe, mal orienté dans cette immense cité, dépendait désormais de Vellor pour nous guider. Pourtant, le jeune garçon, habituellement loquace, se mura dans un silence troublant, multipliant les détours et tentatives de disparition, bien que Louna, notre louve fidèle, veillât au grain, déjouant ses plans d'évasion.
Confronté à nos questions, Vellor révéla finalement que son histoire était un secret, inconnu des habitants de Neverview. Avec résignation, il nous conduisit jusqu'au palais du conseil, une structure imposante mêlant grandeur et élégance architecturale, ses gardiens austères nous défiant du regard.
Devant ces portes, Brän tenta, en vain, de négocier notre entrée, son statut de chevalier ne suffisant pas à fléchir la rigueur des gardes. C'est ma propre intervention, initialement vaine face au questeur, qui finalement permit notre entrée, grâce à une suggestion peu orthodoxe de Kay : un échange discret de sikka contre l'accès au palais.
Admis au sein du palais, nous fûmes dirigés vers la salle d'audience, un silence lourd pesant sur nos épaules jusqu'à l'arrivée du conseiller suprême. Son entrée, dénuée de toute pompe, nous prit de court, tout comme sa demande directe concernant notre présence.
Brän, confus, tenta d'expliquer notre mission concernant Vellor, provoquant l'hilarité du conseiller qui confessa ne jamais avoir eu d'enfant. Le mensonge de Vellor, désormais évident, nous plaça dans une position délicate.
Malgré le tumulte, nous saisîmes l'opportunité pour exposer notre quête principale : trouver une écaille de Naga. Je révélai également ma véritable identité, celle du prince héritier, ainsi que notre besoin urgent d'aide face aux sombres menaces pesant sur le royaume.
Le conseiller, bien que sceptique, fut intrigué par notre audace et nos révélations. Il exprima ses propres inquiétudes quant à la situation précaire de Neverview et des environs, nous confiant une mission diplomatique cruciale vers l'ouest, dans l'espoir de rallier de nouveaux alliés.
À peine cette audience terminée, le conseiller, connu pour son faible pour les dames, invita Moonie à dîner, une invitation qu'elle accepta presque aussitôt.
Nous décidâmes ensuite de clarifier les choses avec Vellor. Reconnaissant son ingéniosité malgré la supercherie, nous fûmes touchés par la décision du conseiller de prendre l'enfant sous son aile.
Nos adieux furent émouvants, promettant à Vellor un avenir meilleur et à nous-mêmes un nouveau chapitre à écrire.
La quête de la potion nous mena ensuite chez Rufus Didéon, l'apothicaire royal. La boutique, enveloppée de mystère et de silence, semblait abandonnée. Notre intrusion, bien que réticente, déclencha un piège magique, Kay frôlant la catastrophe. Heureusement, Moonie, par son intervention magique, neutralisa la menace, révélant la présence cachée d'artefacts précieux.
Notre confrontation avec Roy Jabryt, l'assistant de Rufus, pris de panique, se transforma en échange d'informations et de conseils. Reconnaissants, nous quittâmes la boutique avec des promesses et une potion mystérieuse offerte à Kay.
La soirée nous guida finalement vers Le Poney Frétillant, à la recherche d'un repos bien mérité. La découverte tragique d'un corps sur notre chemin ajouta une note sombre à notre quête, mais l'accueil chaleureux de Fortor à l'auberge nous offrit un moment de répit et de camaraderie, malgré l'ombre des préoccupations familiales planant sur moi.
La soirée se clôtura sur la promesse d'une nouvelle aventure, Kay restant éveillé, avec visiblement une idée en tête….
(fin de la première partie)