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Fri 9th Feb 2024 09:35

Un souvenir douloureux (partie 2)

by Samãy

Il ne fallait pas s’arrêter sur l’instant présent.
Du moins pas dans ces circonstances… Ainsi le jeune prince n’eut pas le temps de réfléchir à se masquer, à camoufler le souvenir en lézardes brunes sur son dos, ni de s’appesantir sur ce cauchemar qui n’en finissait pas, commencé il y a combien de temps déjà ? Ces pauvres gosses qui avaient assistés au carnage, leur camarades dévorés devant leur yeux, et maintenant ça, de nouveau une horreur cannibale… Il serra les dents et mis un voile de détermination sur ses actes et ses paroles… Il s’acharnerait à les sauver, eux et ses amis retrouvés. Il n’était pas passé à travers…. Tout ça … pour en finir maintenant.
 
Et puis ils avaient à présent un nouvel atout de taille, un chasseur et sa panthère… Le destin avait une curieuse manie, celle de faire se rencontrer les solitudes…
 
Samay n’avait pas pu mener totalement son plan à son terme. Il était bien sortit de son médaillon avec des armes à distribuer aux elfes prisonniers, mais il lui manquait la clef… Quand il avait compris que ses camarades restés derrière se battaient, il s’était téléporté au-delà des barreaux pour courir les rejoindre. Il lui fallait cette clef.
 
Il envoya son alliée féérique, Prom, avertir Bran, Moonie et les autres pour que tous se regroupent. Une voix intérieure, qui était plus un cri dans une forêt ou nul ne vivait, un appel inaudible qui ne recevrait pas de réponse, lui fit de nouveau penser à sa sœur… Comment se pouvait-il que le destin le réunisse avec de parfaits inconnus, tissant des liens aussi résistant que la corde de soie d’araignée offerte par les elfes, et qu’il ne le mette pas sur la piste de sa sœur ? Et pourtant Pangur, le chasseur, avait rencontré Lucens. Ce dernier devait forcément être proche de sa sœur, ils s’étaient tous donné rendez vous et le tavernier avait décrit qu’elle était entouré de camarades...Le destin était un enfant capricieux qui se lassait de ses jouets, semblait-il..
 
Un cri de douleur le fit revenir à lui, quand il comprit que s’ était Kethot qui l’avait poussé. Il se tenait la main, et visiblement le fameux Orbe noir dont avait parlé le gobelin en était la cause. Pas le temps d’investiguer pour le moment, mais Kay entreprit de le recouvrir de tissus et de le cacher dans son sac… Pour sa part, Samay ne tenait pas spécialement à emmener cette chose dans sa dimension de poche, au risque de pervertir cette dernière…
 
Cependant ils avaient vaincu leur adversaire, et, grâce à la clef récupérée, ils purent délivrer les elfes qui étaient à présent armés.
 
Ces derniers douchèrent leurs espoirs de trouver des écaille de naga dans la mine, car elle était à présent grouillante de plus d’une centaine de gobelins… Le prince regarda Bran dans les yeux et y lut la même détermination fataliste : il fallait condamner cette mine, et les elfes délivrés leur parlèrent de barils de poudre explosive stoqués dans la salle à manger des gobelins… Un hochement de tête entre le paladin et l’occultiste valida le nouveau plan qui se résumait peu ou prou à tout faire sauter et s’effondrer..
 
Tous écoutèrent les paroles précises et expérimentées de Bran. Samay se demanda ce qu’il avait bien pu vivre, à son tour, pendant toutes ces années, pour avoir appris ces qualités de meneur et de tacticien. Quand tout serait plus calme, il se promit de lui parler, de se confier à cœur ouvert, car il se rendit compte à sa grande honte qu’en voulant préserver ses amis de sa propre histoire tragique, il avait agi égoïstement : ils avaient visiblement tous vécus des tragédies, et si, tout comme lui, elles leur rongeait les veines et l’âme, alors le mieux était de crever l’abcès et de trouver de la force dans le soutient des autres…. Quand les enfants seraient en sécurité, il pourrait leur en parler…
 
La porte s’ouvrit, et avec un synchronisme admirable, Kethot et Samay commandèrent à la terre et aux ronces de piéger leurs adversaire, pendant que Bran et Elendil les contournait avec un objectif en tête : la poudre explosive.. Les racines s’enroulèrent, le terrain se fit vindicatif et les gobelins hurlèrent de rage, de peur et de douleur… Tout se passa très vite, et Samay eut un rire irrépressible lorsqu’ils se retrouvèrent tous dans le couloir, après l’explosion du baril de poudre qui fit tout s’effondrer. En effet, une image rémanente du clone de Moonie en train de danser lascivement et de façon tout à fait incongrue au milieu de ce capharnaüm , avait finit d’achever le barrage qui empêchait son rire nerveux de déferler…
 
Le campement était une bulle hors du temps, les enfants jouant avec le gros chat, ce dernier jetant des regards qui en disaient long sur sa relation de confiance avec le chasseur… Samay s’était recouvert, heureux que personne n’ait remarqué ses marques du passés sur son dos…
 
Ses pensées vagabondèrent, de nouveau baigné de soleil, le pépiement des oiseaux, dehors, lui indiquant qu’il y avait encore de belles choses… Addam l’enserrait et c’était le seul et unique matin qu’il lui restait de lui.. Ou pouvait-il être ? La nuit avait été bien plus efficace que tous les baumes et les onguents… Il l’avait approché, doucement, le corps du prince frémissant dans un reflexe de douleur et de dégout, mais le guerrier occulte, Addam, avait été patient, et quand finalement il avait pu enlacer le jeune elfe sans que ce dernier se recroqueville et se fustige lui-même, Samay s’était laissé aller… Presque un sommeil.. Une inconscience, bien loin des méditations de son peuple. Il était dans une guangue de chaleur, sentant le fin duvet des avants bras du guerrier sous ses propres mains. En sécurité… Désiré, mais pas forcé. Protégé..
C’était il y a bien longtemps, à présent, mais même si sa solitude était bien plus fidèle maitresse que les rencontres de chair et de sang, il était entouré ce soir, et encore vivant… Son regard balaya la troupe hétéroclite, et y trouva de l’espoir…
 
Son répits ne fut que de courte durée, car, alors que Moonie semblait avoir trouvé une solution pour Rufus, ce dernier se métamorphosa sous leurs yeux, en une hideuse caricature de lui-même, assoiffée de pouvoir, et disparu, choquant toute l’assemblée… Il était trop tard pour lui, il était devenu une liche, malfaisante et puissante.
Et comme souvent, dans ce fragile équilibre, la perte fit place à un cadeau : l’apparition de la Louve de bran, entité lumineuse et bienveillante, qui dissipa toutes les craintes des enfants. Samay sourit à Bran, heureux qu’il ait pu mettre à profit les enseignements de la prêtresse elfe. La louve était magnifique et empreinte d’intelligence. Elle ferait une bonne nounou pour les enfants.
 
Le prince avait gardé depuis toutes ces années le manifeste de Mohun, reproche tangible de la mort de son père. Mais il avait bien fait, car grâce à ce dernier et à la perspicacité de ses camarades, ils purent déchiffrer les inscriptions de la tour et comprendre qu’il fallait rester dans la lumière. Kethtot alluma tous les braseros trouvés et heureusement, car la nouvelle vision dans les ténèbres du jeune prince lui fit voir des créatures qu’il valait mieux ne pas décrire à ses camarades…
Moonie fit l’étrange découverte, aidée de Bran, que ce lieu était béni par sa déesse. Avec son aide, la troupe pu conclure qu’il serait bon de prendre les flèches trouvées dans un tombeau, gardé religieusement par un chevalier décédé longtemps auparavant. Un rituel inscrit dans son livre des ombres permit au jeune prince de comprendre que c’était des flèches tueuses de dragon…. Ils les emportèrent avec eux..
 
Mais c’est lorsqu’ils découvrirent la tombe de Malicia que le cœur de Samay s’arrêta net. Dans les bras de la grande mage Naga, se tenait le squelette d’un nourrisson enveloppé dans des draps frappés du sceau royal. Il ne faisait aucun doute, c’était le squelette d’un elfe… Il vécu la suite dans une gangue de coton et de doute, se demandant ce que cela pouvait signifier… Un enfant royal ? protégé par une mage puissante ? Pourquoi ? Etait-ce son frère ? avait-il eut un frère ? Il marchait sur une corniche de doutes, menaçant à tout moment de lâcher, et sa chute était vertigineuse.
 
Il se rappela vaguement qu’ils renoncèrent à garder une épée démoniaque épargnée par le temps. Mais la réalité vint le gifler de nouveau violemment quand, après avoir fait léviter livres et parchemins, il tomba sur une lettre… La voix tremblante, il la lu à ses camarades, et chercha du réconfort dans leur regard.. Cela ne se pouvait, cela ne se pouvait !
 
Il était à nouveau un enfant, son père explosant devant lui, le maculant de sang… Il faisait de nouveau son pas féérique, mais avait l’impression d’être tout de même écrasé…
Puis tout bascula de nouveau, la tour s’effondrant… Il tenta de sauver Velor, mais Bran avait réagit avant lui, comme toujours.
Dans la poussière et le fracas, le groupe se relève, pour assister à une nouvelle épreuve : un elfe au prise avec un monstre reptilien à plusieurs têtes… Sans même se demander pourquoi, ils tombèrent d’accord pour lui porter secours, l’urgence lui laissant un répit mental pour toutes les questions insidieuses que suscitait la lettre.