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Wed 5th Jun 2024 02:58

Le tout dernier voyage ?

by Pangur Bán Jowro Futatoro

LE DÎNER MULTICOLORE ?
 
Après le discours de Prince Samay, au dîner, l’atmosphère d’abord très solennelle s’est allégée. La métaphore filée des « vignes de l’unité » que nous devions cultiver a semblé faire mouche, sauf peut-être auprès de Dame Gugnyk, l’elfe noire pleine de noblesse en face de moi, qui m’a semblé lever les yeux au ciel. Je l’interrogeai sur sa confiance en Samay, sur sa confiance en nous. « Je suis ici car j’ai donné ma parole, me dit-elle. Et puis, j’aime bien votre couleur de peau. » Elle me fit sourire. Elle était alliée, oui, mais semblait vouloir garder à tout prix la culture de sa différence. Cela me fit plaisir d’être assuré de son assistance. J’avais rencontré son peuple lors d’une de mes premières aventures avec le groupe. Opprimés, oppressés par des orcs, les elfes noirs m’avaient touché et ramené dans mon passé.
 
Dans les épaisses mines de métal,
Sous le joug de la naga corruptrice
Les kobolds frappent et laissent des cicatrices
Moi je creuse la terre comme un animal

 
Ce peuple si différent du mien avait enduré la même souffrance, celle qui prive un être de ce qui le définit en tant qu’être. Humains, elfes, nains, peu importait. Et ce qui m’avait encore plus ému était la façon dont Samay et mes autres compagnons les avaient aidés, au péril de leur propre vie.
 
C’est pour cela que j’étais ici. J’avais non seulement retrouvé une famille, mais je sentais qu’en suivant une quête qui me dépassait, j’allais réaliser ce qui pouvait le plus m’apaiser : faire perdurer le nom des Futatoro. Et un jour peut-être, aller chercher les survivants de mon peuple.
Sous la table, je serrai la main de Jalal, le berbère à la peau de châtaigne qui avait fait fondre mon cœur sous ma peau d’ébène.
 
Ko dum o dum laawol ngal dabbude. (Un seul bracelet ne tinte pas, proverbe peul).
 
 
LA DERNIERE NUIT ?
 
Jalel avait planté une tente dehors. Hommes du désert et des plaines, nous y dormirions bien mieux que dans les riches soieries des palais. Et j’avais envie d’être seul avec lui, même si la proximité de mes compagnons d’armes ne m’effarouchait plus. Seul avec lui car je savais que nous risquions de ne plus nous revoir avant longtemps. Nous fûmes sages cette nuit-là, nous contentant de nous étreindre dans les bras l’un de l’autre et de respirer notre odeur. Jalel devait mener ses hommes à la guerre contre les armées de l’ombre. Je devais aller trouver l’écaille de naga dans le tombeau de Mahan Prakaash, dans les ruines du palais de Neelam, avec Samay, Bran, Moonie… et demain matin Katarina devrait affronter le grand père de Mars. Elle nous avait tout expliqué après le dîner. J’avais déjà compris l’essentiel, en écoutant « un peu » aux portes…
 
LE DUEL REPOUSSE ?
 
Quelle joie ! Même si ce n’est que partie remise. Karis, le grand-père de Mars, a envoyé sa fille Miranda combattre à sa place ! Katarina bouillonnait ! J’espère qu’elle gagnera sa vengeance. Je la comprends. Son frère est mort.
Je comprenais également Kethot qui s’était isolé loin du palais et n’avait pas participé au dîner de la veille. Je fis une entrée tonitruante dans sa tente avec ma Cwengu qui lui lécha le visage ! Mars était magnifiquement allongé auprès de lui, à peine recouvert par le drap. Leur peau à tous les deux était tellement blanche. comparée à la mienne... Albâtre et ébène...
« – Laisse-moi Pangur, je dois dormir…
– Tu as surtout besoin d’évacuer le tonneau de bière que tu as descendu ! Viens avec nous, Kethot, le duel est repoussé, personne n’est mort, Kay… pardon, Kat, a accepté de repousser sa vengeance personnelle afin que nous partions à la recherche de l’écaille. Il me tarde que nous la trouvions, cette fichue écaille ! Tu sais que c’est ça que je devais rapporter au riche marchand quand je suis parti de Port Shanti..? » Mais je sentais que mes paroles ne faisaient qu’augmenter son mal de tête.
En partant, je ramassai discrètement un autre « mouchoir » au pied de leur couche, afin qu’il rejoigne « mon petit trésor » nécessaire à Cwengu lorsqu’il s’agit de renifler la trace de mes compagnons.
 
Au moment de partir, je donnai ce que j’avais sans doute ce qui me restait de plus précieux à Jalel : mon armure de cuir. Je ne la portais plus, je l’avais remplacée par une plus robuste, avec des clous… Mais celle-ci me venait de ma sœur Shayna qui l’avait cousue de ses mains. En échange, mon compagnon à la pierre tournoyante me confia un talisman en argent gravé en forme de triangle. Des « 8 » entrelacés y étaient gravés. Pour me porter chance.
Au revoir Jalel. Au revoir et pas adieu.
 
Même si, je le sentais, ce voyage risquait d’être la fin. Ou le début… de quelque chose qui me dépassait.
 
 
LA VERITE REVELEE ?
 
Avant d’affronter des crânes de feu lévitant au-dessus de pièges, Bran m’avait fait don d’un grand arc magnifique. Le bois était finement gravé et représentait des feuillages qui me rappelaient les arbres des Futatoro. Je pouvais conserver de côté mon premier arc, offert lui par Sow, mon ami d'enfance.
 
Shayna, ma sœur, je te montrerai un jour mon armure chic
Sow, mon ami, mon frère, je te montrerai un jour mon arc elfique.
Je suis un nouveau chasseur, je ne chasse plus le lion
Moi Pangur, je sauve le Monde avec mes compagnons.

 
Merci Bran ! Je ne savais pas encore quels pouvoirs passifs cet arc possédait, mais il fit merveille contre le crâne de feu qui nous menaçait. J’étais devenu un tireur d’élite. Mes flèches rataient rarement leur but.
 
Katarina est une femme très belle. Elle porte encore en elle son besoin de vengeance mais elle s’affiche désormais au grand jour, elle ouvre les portes comme Kay, elle se bat comme Kay, elle est aussi agile que Kay… avec la même grâce que Kay, mais un poids en moins. J’étais honoré d’avoir fait pivoter la statue en forme de serpent à la recherche d’une ouverture. Elle trouva la serrure. Nous trouvâmes les clés plus tard.
 
Dans le tombeau de Mahan Prakaash, l’ancêtre de Samay, nous trouvâmes trois sarcophages. Dans celui de Mahan Prakaash, point d'écaille de naaga, mais un bouclier d'apparat. J'en aurais pleuré. Chaque aventure, chaque lieu, chaque instant étaient censés nous rapprocher davantage de la précieuse relique. Mais là j'avais l'impression qu'elle devenait de plus en plus inaccessible...
A la place, il nous a fallu résoudre des énigmes, ouvrir un cryptex, lire le journal d'une infecte gobeline perverse au langage ordurier... Pour découvrir que Rufus, le mage naga métamorphosé en liche par le fléau, Rufus dont nous avions perdu la trace depuis longtemps, Rufus le corrompu, avait été là, dans cette pièce, quelques heures auparavant. Le journal de Madriga, la gobeline ordurière, nous apprit qu'il souhaitait devenir immortel, voyager dans le temps. C'était lui, bien sûr, qui devait avoir dérobé l'écaille !
 
Il nous fallait courir, encore, courir pour vite rejoindre le malfaisant aux gorges de Neelam. Il projetait apparemment l'ouverture d'une faille. Il était en possession du "cube". Et nous savions qu'il possédait désormais l'écaille. Tout n'était peut-être pas perdu.
 
En guise de vérité, nous comprîmes que le destin de Samay était écrit. Qu'il était en quelque sorte la "réincarnation" de son ancêtre Mahan Prakaash. Qui était Vasuki, dont le tombeau était vide ?.. Qui était Anantaakal ?..
Pourquoi Moonie avait-elle reçu les prédictions "6" et "12" de sa chère déesse Sumie ? 612... Une date charnière dans l'histoire de la famille de Samay.
En quittant la pièce, je jetai un dernier coup d’œil aux tombeaux...Personne ne semblait se soucier de la reine consort, elle aussi enterrée ici, son cercueil repeint à la va-vite. C'était définitivement une histoire "entre hommes"...
Les couvercles cassés des cercueils me firent mal au cœur... Comme si nous avions ouvert une boîte de Pandore et que le mal ne pouvait plus être y être contenu. Nous ne pouvions plus reculer. Nous étions là pour, nous aussi, affronter notre DESTIN.
 
 
DES DRAGONS ?
 
Cwengu était étourdi et très affaiblie. Couchée sur le flanc, elle semblait presque de l'autre côté. Mon cœur se serra. j'avais à tout prix essayé de débusquer Madriga sur le champ de bataille. La gobeline perverse se téléportait dès qu'elle était à portée de l'un d'entre nous. Je l'avais vue en face de moi, tout près, mais avant que je puisse dégainer ne serait-ce qu'une seule de mes épées courtes, l'infâme avait disparu. Cwengu avait reniflé sa piste à un autre endroit du terrain, non loin des célèbres menhirs des Gorges de Neelam. D'un mouvement de tête, je donnai l'autorisation à Samay de lancer un sort pour la faire apparaître. Mais c'est Cwengu qui tomba...
Les orcs présents sur le champ de bataille avaient été balayées par les éclairs de la compagnie et une nouvelle créature très puissante invoquée par Moonie. Une céleste !
Rufus était apparu. Sorti d'un portail bleu. Sa puissance était indescriptible. Protégé par une bulle d'antimagie, mes épées courtes, même imprégnées de magie, ne semblaient même pas l'égratigner. Il se jouait de nous. Il avait brandi le cube... Une sorte de rayon en était sorti, allant frapper... l'écaille d'un dragon ! Un magnifique dragon de bronze qui arrivait derrière nous, volant au-dessus du sol. Il me semblait plutôt petit, mais déjà majestueux, étendant ses ailes sur une envergure d'une bonne vingtaine de mètres déjà... Je n'aimais pas beaucoup la magie, mais j'appréciais ces créatures. Celui-ci semblait dirigé par un être à la peau rouge et à la cape bleue, cornu tel un diablotin... Mais je n'eus pas l'occasion d'admirer la scène davantage, car alors que Rufus allait s'engouffrer dans son portail bleuté, le dragon projeta un souffle de tonnerre terrible, qui nous frappa violemment mes compagnons et moi.
 
Je serrai entre mes doigts le talisman de Jalel. Et ma dernière (?) vision fut plus effroyable. bien plus effroyable. Du ciel, écartant les nuages de ses membres puissants, Il se frayait un passage. Il était rouge vif. Il était monstrueusement fascinant. Il était monstrueusement dangereux. Il était le début et la fin, l'Alpha et l'Omega. Il était notre mort et notre renaissance. Il était l'Ouroboros. Anan...
 
Mes amis, je suis là.
 
Mes esclavagistes m'ont nommé PANGUR BAN
"Tout blanc" ; ce n'est pas moi. J'ai fui, j'en suis coupable.
Aujourd'hui je renais : JOWRO est mon vrai nom
Ca signifie "guerrier", ce n'est pas sans raison.
 
Sur une page blanche, mon destin s'est écrit
Debout face à la mort, j'espère ma survie,
J'irai tous vous venger, famille et compagnons,
Avec ma panthère, mon fier arc, mon tympanon.
 
J'étais chasseur, dresseur, j'étais un sauvageon
Je suis Pangur, Jowro, je suis FUTATORO
Je suis vitesse, je suis dextérité
Je ne suis pas mort, mais sans cesse recréé