Thorgan regardait avec de grands yeux étonnés son ami de petite taille se démener comme s’il était possédé. Damathos vint en aide au jeune nain et, après l’avoir rassuré, lui conseilla de se focaliser sur la voix, de l’écouter et de la décrire.
« La reconnais-tu ? T’est-elle familière ? »
L’enfant, le visage déformé par la peur, se radoucit subitement et lui répondit par l’affirmative.
« Demande-lui qui elle est alors.
– Sana ! s’exclama Vladimir. Elle me dit que nous courons un grave danger. Elle doit nous prévenir. Elle nous cherche dans la forêt et nous demande de la guider jusqu’à nous. »
Comme le nain s’embrouillait dans des indications impossibles à comprendre, Quarion envoya sa chouette Morteau montrer le chemin à la prêtresse. Celle-ci apparut quelques minutes plus tard, le visage fermé et le regard soucieux. Les retrouvailles laissèrent vite place à un remontage de bretelles en bonne et due forme ainsi qu’à un avertissement quant aux représailles terribles du capitaine de la garde impériale qui avait d’ores et déjà envoyé une garnison à leurs trousses.
Quelle ne fut pas leur surprise lorsque les quatre aventuriers découvrirent qu’en exécutant l’ordre de Garon et partant à la rescousse des fermiers, ils avaient commis un incident diplomatique que le maire de Brytvia n’avait résolu qu’à moitié. Le capitaine Astor, outré que sa mission n’ait pas eu la priorité, avait littéralement vu rouge lorsqu’il apprit qu’un ordre relatif à la sécurité des civils avait été donné par un vassal. Sana, sans prendre le parti du capitaine, expliqua que Garon avait réussi à éviter la crise diplomatique et la mise sous tutelle de la ville mais n’avait rien pu faire pour eux quatre. Ils se retrouvaient ainsi accusés de refus d’obtempérer à un ordre impérial et de trahison politique en privilégiant l’autorité hiérarchique du maire à celle de l’empire. Damathos et Adamante soupirèrent, conscients des règles de gouvernance auxquelles tout citoyen d’Abrasia était soumis, alors que Quarion et Vladimir poussèrent des cris d’indignation, l’un parce qu’il n’y connaissait rien aux lois politiques, l’autre car il s’en fichait comme d’une guigne.
Sana commençait à s’agacer, et, tout en réfrénant son envie de leur en claquer une derrière les oreilles, Adamante leur intima de la boucler. Il fallait trouver très rapidement une solution à un problème apparemment insoluble et leurs braillements l’empêchaient de se concentrer. Sana leur conseilla de quitter le territoire et s’exiler dans un autre duché. Vladimir commença à pleurnicher car il ne verrait plus sa mère et ne pourrait plus jamais revenir au monastère. Adamante frémit en sentant la morsure de son premier exil se rappeler à son bon souvenir. Il serra les dents et frappa son poing dans son autre main :
« Hors de question ! Nous ne sommes pas des fugitifs ni des traitres !
– J’avoue que mon apparence ne suscite pas la sympathie. Si en plus, je me traîne une réputation aussi peu reluisante… ajouta Damathos en hochant la tête tout en se frottant les cornes. Fallait-il demander une audience auprès du capitaine ? proposa-t-il.
– Autant mettre tout de suite la tête sur le gibet, rétorqua Sana.
– Ben justement, on marche sur la tête là ! explosa Quarion, exaspéré de cette injustice et de cette restriction arbitraire de leurs mouvements.
– Je vous rappelle que nous étions en train d’enquêter sur une affaire de la plus haute importance. On parle là d’un dragon, d’un primordial susceptible de se muer en Éveillé. Il sortit le tourniquet qu’il fit virevolter d’un main nerveuse.
– Pardonnez-moi mais si on doit parler priorité, il me semble que notre véritable mission surpasse toutes les autres, surtout ces petites guéguerres de pouvoirs. Et puis Diantre ! Ce n’est quand même pas un pantin de l’empire qui va nous dicter ce qu’on doit faire ? ».
Finalement ce Quarion lui semblait de plus en plus sympathique (qui l’eut cru ?). Adamante surenchérit : les impériaux pouvaient bien les accuser d’insurrection ou je ne sais quoi, leur mission était bien supérieure à ces cafards avides à l’ego surdimensionné et il était capital qu’ils restent sur place pour continuer leur enquête. Damathos, peu versé dans les problématiques politiques et de gouvernance, rappela l’urgence à enrayer le phénomène des monstres et autres horreurs nécromantiques. Mais comment obtenir l’autorisation de rester dans le Duché ? Damathos, un sourire malicieux sur les lèvres, suggéra de négocier la levée de l’accusation contre le coffre qu’Astor semblait si impatient de récupérer.
« Et si on leur jouait un tour ? ça leur ferait bien les pieds à ces impériaux ! »
De quoi parlait encore le morveux ? Si c’était encore une histoire de bonbons, Adamante allait perdre patience. Sous l’œil suspicieux du guerrier qui, ce faisant le regardait doublement de haut, Vladimir ne se dégonfla point.
« Eh bien … Après tout, on a accepté la mission de Garon, c’est vrai. Mais qui sait qu’on a donné la priorité à cette dernière ? Si on fait la peau à ces bandits et qu’on revient avec le coffre, bref qu’on fait exactement ce que nous a ordonné Astor et que personne n’apprend qu’on a foncé droit sur les fermes, et bien le capitaine pourra revenir sur sa décision ?
– Vladimir enfin, dit Sana en levant les yeux au ciel, ça ne suffira pas à calmer la fureur d’Astor. Et puis, tout le monde à Brytvia vous a vus partir du côté des fermes, et c’est la direction opposée où le convoi a été attaqué ! ».
– Nan mais attendez ! rebondit Quarion. L’idée n’est pas si mauvaise, simplement ces fameux documents on pourrait les garder pour nous. Vous ne trouvez pas qu’Astor tient ces documents en une estime tellement haute que ça en devient suspicieux ? Imaginez, si on ramène les documents à un commandant impérial ? On pourrait faire lever l’accusation et mettre notre cher capitaine dans une sacrée panade... J’ai envie de dire une pierre deux coups »
– Moi tant qu’il y a quelque chose à voler ! » ajouta Thorgan, une lueur de ravissement dans le coin de l’œil.
La réaction unanimement entendue du groupe scella le débat. Même Sana ne put s’empêcher un sourire discret. Damathos se tourna alors vers les fermiers :
« Vous promettez nous que vous ne mentionnerez jamais à qui que ce soit notre présence ici ni notre combat contre les ogres ? »
Les fermiers, dans une attitude pleine de gratitude, s’inclinèrent et promirent de garder secret le nom de leurs sauveurs. Sana, pressentant que les quatre aventuriers jouaient tout de même avec le feu et pourraient commettre une énième bévue, décida de les accompagner. Ils se mirent ainsi en route prestement dans l’espoir de devancer les gardes impériaux.
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La route pour atteindre la falaise où les brigands avaient dressé leur camp était longue et il fallait de surcroît faire un détour important pour éviter Brytvia. La charrette leur serait bien utile. Ils la récupérèrent et y attelèrent le cheval de Sana. Les cheveux dans le vent et grisés par l’idée de faire la niaque à un capitaine impérial, ils filaient à toute vitesse. Seuls Sana et Damathos restaient songeurs et quelque peu sceptiques devant la dangerosité d’un tel plan – mais quelles autres alternatives avaient-ils ? Ils empruntèrent soigneusement les routes secondaires, une rencontre avec les gardes serait fort déplaisante. S’ils ne croisèrent aucune garnison, ils apprécièrent fort peu l’interaction avec une vieille femme qui furetait devant une auberge crasseuse et leur hurla des imprécations à leur passage. Ses vociférations ne durèrent que quelques dizaines de secondes, mais Vladimir eut la chair de poule et tous ressentirent un étrange malaise leur serrer le cœur.
Quelques heures plus tard, ils décidèrent de s’installer pour la nuit. Des tours de garde furent organisés mais Damathos, toujours aussi prudent et pragmatique, recommanda d’y ajouter quelques pièges qui les avertiraient de la venue potentielle de soldats impériaux ou autres voleurs sans scrupules. Quarion leur offrit ses services et, après avoir marmonné quelques incantations d’une voix sifflante, il déroula autour de la tente des fils invisibles à l’œil nu qui serviraient d’alarme.
Rassurés, les compères se couchèrent, Quarion ayant proposé de prendre le premier tour de garde. Était-ce la saturation émotionnelle de ces derniers jours ou l’épuisement physique du dernier combat ? Toujours est-il que le sorcier, un peu trop confiant dans l’efficacité de son piège, s’endormit peu de temps après. Il se réveilla en sursaut, la sueur perlait sur sa nuque. Quelque chose n’allait pas. Il se leva et découvrit avec consternation que la couche de Sana était vide. Était-elle allée faire ses besoins comme on dit poliment entre gentilshommes ? Il sortit fébrilement de la tente. Quelle était cette supercherie ? Les fils étaient intacts ! Il scruta la nuit mais ne vit pas l’ombre d’une Sana. Sacrebleu, ça allait barder pour lui, c’était sûr. Mais il ne fallait pas perde une minute.
Il remit en place son veston de satin pourpre pour se donner du courage et s’engouffra dans la tente. Sans grande surprise, le nain perdit tout de suite son sang froid en suppliant Adamante de courir à la rescousse de la prêtresse, alors que ce dernier observait la couche vide en grommelant « Elle n'a pas pu laisser son duvet. On ne laisse pas ses affaires comme ça ! » Damathos essayait de comprendre sans réussir à y parvenir. Thorgan, imperturbable, ronflottait encore dans son duvet. Sana les aurait-elle trahis ? Les larmes vinrent aux yeux de Vladimir. Il n’en fallut pas plus pour que le groupe se décida à partir à la recherche de la prêtresse quelles que soient les raisons de sa disparition.
Damathos qui inspectait les environs découvrit des traces de pas qui ressemblaient à ceux d’une femme. Enjambant précautieusement les fils, ils suivirent la piste et s’engagèrent dans la forêt. Adamante comme d’habitude ouvrait la marche alors qu’il n'y voyait pas à un mètre dans la nuit noire, Vladimir et Thorgan bien cachés derrière lui. Ils arrivèrent à un buisson où des branches cassées et des feuilles jonchant le sol laissaient supposer une empoignade ou une lutte. Sana aurait-elle été attaquée ici ? Quarion, dont la vue elfique lui permettait de discerner de menus détails, remarqua un objet à demi dissimulé sous les feuilles. C’était le bracelet de Sana qui dans la bagarre avait dû tomber.
Le groupe en était maintenant sûr : Sana avait été kidnappée. Mais par qui ? Et pourquoi ? Ils continuèrent leur inspection plus en amont jusqu’à sortir de la forêt et tomber sur une auberge qui ressemblait étrangement à celle où ils avaient vu la vieille harpie. Thorgan suggéra de procéder à un repérage des lieux, mieux valait être prudent. Après avoir bien fait craquer ses articulations et s’être dégourdi les jambes, le preps escalada prestement le mur de la maison.
Ses trois acolytes cachés derrière un buisson observaient en silence sa silhouette se mouvoir telle un félin d’une fenêtre à une autre. Thorgan ne sembla pas s’attarder outre mesure devant la première, il ne devait y avoir personne. La seconde en revanche devait être plus intéressante, le petit voleur sortit de sa besace un petit caillou pointu avec lequel il découpa la vitre. Les trois spectateurs de cette performance d’agilité le virent s’engouffrer lestement dans la chambre puis y ressortir quelques minutes plus tard, le pouce en l’air pour leur signifier que, de côté-ci, il n’y avait rien à craindre. Mais qu’en était-il du rez-de-chaussée ? L’absence de fenêtres à l’arrière de la maison n’apportait aucun indice. D’un commun accord, ils contournèrent l’auberge sur le côté droit où se situait l’étable.
Adamante et Vladimir la fouillèrent en vain. Le guerrier pressentant que Sana était en danger et que l’heure n’était peut-être plus à la prudence s’avança d’un pas sûr devant la porte d’entrée de la bâtisse, le nain trottant derrière lui. Un cri strident fit hérisser les cheveux de ce dernier qui stoppa net son avancée. C’était la voix de la vieille sorcière qui fusait de l’intérieur de l’auberge et invitait Adamante à y entrer. Vladimir se plaqua contre le mur priant pour que le vieille ne l’eusse pas vu. Alors qu’Admante s’avançait au milieu de la salle, le nain revint sur ses pas et tenta d’espionner par la fenêtre. Damathos et Quarion, également postés derrière le mur, préparaient leurs sorts tout en le pressant de leur décrire la scène.
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Plusieurs personnes se tenaient à table et dégustaient ce qui ressemblait à des plats de viande à moitié cuite tout en vidant des verres de vin ou des choppes de bière. Si on recherchait l’ambiance gaie et un peu grisante typique des auberges qui servaient à toute heure de la nuit, nul doute qu’on ne la trouverait pas ici. La tension était palpable. Elle augmenta d’un cran lorsque la vieille s’adressa à nouveau à Adamante qui se tenait bien droit au milieu de la salle, jaugeant chacun des clients : ici un marchand et son homme de main, un nain équipé d’une hache qui aurait tranché en deux un taureau, là un trio d’hommes à la mine patibulaire qui lui inspiraient aussi peu confiance que la vieille édentée qui glapissait derrière son comptoir crasseux.
« Monsieur aurait bien une petite faim en cette heure avancée ? Et ses autres compagnons désireraient-ils se désaltérer ? Le petit nain le nez collé à la fenêtre, il aimerait boire quoi ? Une petite bière ? ». Vladimir crut défaillir quand il senti le regard perçant de la vieille le scruter. Il se rapetissa en lâchant un petit cri d’animal. « C’est fini les jeux de cache-cache. On y va », lui dit Damathos en l’entraînant avec lui.
La chair sanguinolente qui s’étalait dans les plats des clients retourna l’estomac de Vladimir, il jeta un coup d’œil en arrière cherchant l’air frais de dehors, mais un elfe, certainement un homme de main de la Maison, ferma la porte. Même Adamante semblait écœuré. Son esprit tendu comme un archer prêt à décocher sa flèche, il sentait le danger proche, trop proche et pourtant indiscernable. Il fallait en savoir plus. Il s’avança vers le marchand et le questionna sur ses activités et sa présence ici. Évidemment, il n’obtint que des réponses vagues et attendues. Le marchand itinérant ne faisait qu’une halte dans cette auberge misérable pour s’y restaurer et se reposer. L’odeur rance de ces tartares commençait vraiment à lui monter à la tête. Des hurlements du côté du comptoir mirent fin à son interrogatoire. La veille ne faisait plus la maligne – oh ça non, maintenant qu’elle avait notre ami Thorgan qui visait avec tout le sérieux du monde sa tête comme une belle pomme qu’on s’apprête à percer d’un bon coup de carreau. Ça l’aurait bien fait rire dans d’autres circonstances mais là, on n’avait pas le temps pour ces pitreries. Il fallait trouver Sana.
« Alors Tom Pouce ? Comme ça on est frères d’armes ? On ferait partie de la même guilde ? Ah Ah ! À la bonne heure ! Allez qu’est-ce que t’attends donc pour la clouer au pilori la vieille ? Tes cent balles t’attendent ! »
Le vieux voleur, sûrement le chef vu que lui seul avait l’air de savoir aligner deux mots, faisait rebondir une bourse de cuir dans une grosse main aux ongles noirs de saleté. Thorgan allait décocher son carreau. C’était sans compter sur Vladimir qui s’interposa en gueulant comme une espèce de paladin niaiseux. Le rire gras des trois mercenaires et un regard noir de Thorgan furent ses seuls remerciements. Adamante commençait à avoir le tournis, la situation était absurde presque surréaliste. Un entrechoquement strident de verres le réveilla de sa brève torpeur, c’était les trois brigands qui venaient de trinquer, sûrement à l’humiliation de Thorgan, ou à un butin volé vu la bourse pleine ou alors … au kidnapping d’un belle prêtresse dont on avait tiré son pesant d’or auprès d’un marchand d’esclave ?!
« Bordel ! » Adamante sortit son épée à deux mains sans une once d’hésitation et l’abattit lourdement sur l’épaule du chef qui n’ayant rien vu venir était encore en train de verser l’intégralité de son vin dans le gosier. Le vin comme le sang se déversèrent d’un seul sur la nappe. Le vieux restait abasourdi, son bras à moitié démembré pendouillant sur le rebord de la table. Le carreau destiné à la tenancière démoniaque trouva finalement sa cible en l’entrejambe du brigand. Thorgan s’élança sous la table tel un guitariste en furie et fit chanter de son arbalète les grelots de son adversaire. Pour sûr ceux-là ne clameraient plus la sérénade à la première gueuse passée, ni leur prioritaire d’ailleurs.
Quarion n’était pas resté les bras croisés et envouta le deuxième brigand qui, pris d’une soudaine envie de dormir, s’effondra tête la première dans son tartare. Pendant ce temps, Vladimir, qui n’avait rien compris à ce qui venait de se passer, décida de s’en cogner le coquillard. En parlant de cogner, il asséna une série de coups de poings au troisième brigand. Un instant, le visage de Sana flotta dans son esprit. Sous l’effet de la fureur, le poing se changea en une armée de chevaux lancés au galop. Le coup fut si violent que la tête fut projetée en l’air. D’humeur toujours aussi artistique, Thorgan l’envoya valser d’un coup de pied footballistique sur la vieille qui continuait de hurler derrière son comptoir. La tête rebondit sur le parquet et vint se loger entre les pieds de la tenancière. « Au moins, maintenant elle sait pourquoi elle gueule » lança Quarion pendant qu’il plantait sa dague dans la nuque du brigand endormi.
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En un claquement de doigts, la pièce s’était vidée. Le marchand et son garde du corps s’étaient réfugiés dans leur chambre et les propriétaires de l’auberge s’étaient enfuis. « Les chambres ! Il faut fouiller les chambres » cria Adamante en s’engouffrant dans l’escalier. Arrivé à l’étage, il se jeta de toutes ses forces contre la porte au risque de s’assommer car la porte ne bougea pas d’un gond. L’essai de Vladimir fut tout aussi minable. « Mais cette auberge est un repaire de sorciers ce n’est pas possible !! » Quarion et Damathos échangèrent un regard outré mais ne dirent mot. Adamante n’en pouvant plus, il brisa la porte d’un coup de pied qui aurait tout aussi bien pu arracher la tête du brigand que le coup de poing du nain. L’effort ne fut guère récompensé : la pièce était vide comme le leur apprenait seulement Thorgan.
La rage d’Adamante se déporta sur l’autre porte, mais, avant que celle-ci ne vole en éclats, l’halfelin eu la présence d’esprit de l’avertir que trois mercenaires y dormaient. Quarion envoya Morteau vérifier ce qu’il en était : s’il y avait bien trois aventuriers qui dormaient ici, il n’en restait plus qu’un, un nain en chemise de nuit qui faisait le mur. Les autres s’étaient enfuis. Damathos descendit les escaliers en toute vitesse pour tenter de le stopper. La troisième porte fut moins retorse mais nos trois sauveurs n’étaient pas au bout de leur peine. Plus qu’une chambre c’était une petite forteresse dans laquelle s’était claquemuré le marchand. Un véritable guet-à-pents les attendait : car curieusement ce n’était pas un mais trois gardes du corps qui accompagnaient le commerçant ambulant.Les nains étaient drôlement bien équipés et les sorts de Damathos auraient été bien utiles pour leur percer l’armure !
Loin du combat certes, mais Damathos avait fait une bonne trouvaille. Il avait appris du nain fugitif que Sana avait été vue aux côtés du marchand et que ce dernier l’avait comme qui dirait livrée à la tenancière. L’état presque drogué de la prêtresse l’avait intrigué et il avait regardé la scène, la vieille aubergiste remontait les escaliers de la cave avec une marmite de viande et semblait évaluer la jeune femme sous toutes les coutures. Il fallait en avertir les autres au plus vite.
Alors qu’il se ruait vers l’intérieur de l’auberge, il vit le marchand faire un vol plané depuis la fenêtre du premier étage. A sa suite la tête fouineuse de Quarion qui tout en riant clamait ses incantations. Le marchand frappé d’un sort de sommeil était désormais enterré vivant par le sorcier qui de ses mains commandait à la terre d’aspirer de corps de sa victime. À la fin, seule la tête émergeait. Damathos ne peut s’empêcher d’apprécier la classe de l’attaque et gifla la tête pour la réveiller mais aussi avec un peu de plaisir car on ne réveille pas ainsi une victime d’un sort de morphée, et il le savait bien. Le reste de la bande descendit, et d’un claquement de doigt Quaria dissipa le soir. Des yeux implorants les regardèrent.
Adamante gronda « Elle est où ? ». Le marchand, tétanisé par la peur, ne savait que répondre et indiquait de ses yeux globuleux le comptoir. « Elle est dans la cave », leur expliqua Damathos. Ils y coururent et ouvrir la cale avant de s’engouffrer dans le cellier. « Foutaises !! Il y a personne là-dedans… », vociféra Adamante en faisant tomber des tonneaux de vin dans sa colère et son désespoir. « Regardez ! » leur intima Thorgan et il tira de toutes ses forces un tapis étalé derrière la rangée de tonneau, révélant une autre trappe qu’ils ouvrèrent prestement.
Sana était là, épuisée et au bord de l’évanouissement, mais saine et sauve. Elle était effectivement sortie durant la nuit pour prendre l’air et avait surpris des bruits dans les fourrés. Soudain, son esprit s’était embrumé et elle n’était plus que la spectatrice de son propre corps qu’elle voyait, impuissante, kidnappé par le marchand et ses sbires. Un moment, elle réussit à reprendre le contrôle en essayant d’arracher l’amulette que le marchand utilisait pour l’hypnotiser mais les nains se ruèrent sur elle. Elle avait été amenée jusqu’ici et vendue à l’aubergiste pour que son corps serve de pitance. Elle leur montra l’atelier de boucher que dans leur précipitation ils n’avaient pas remarqué.
Soudain, un bruit d’outre-tombe les fit sursauter. C’était Thorgan qui vomissait à s’en tordre les boyaux.
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